Kit de Survie en Territoire Masculiniste

En : 2021
Écriture et conception: Marion Thomas
Collaboration artistique: Maxine Reys, Audrey Bersier
Jeu: Maxine Reys, Audrey Bersier, Marion Thomas, Naima Arlaud
Co-production: Frag, Pintozor Prod, le théâtre du Grütli (Genève), Les Subsistances (Lyon), programme Open Access

Pour son Kit de Survie en Territoire Masculiniste, Marion propose au public de l’accompagner dans le monde des incels, une communauté d’hommes hétérosexuels qui n’ont jamais eu (ou très peu) de rapport sexuel et qui se rassemblent sur internet autour d’une cause commune: la haine des femmes. Marion propose une approche subjective et sensible, celle d’une balade sonore dans l’espace urbain, qui entrelace son expérience personnelle de la rue à celle d’un incel. Au cours de cette balade guidée, le public pourra personnaliser son expérience en décidant jusqu’à quel point iel veut pénétrer les arcanes des masculinistes. Il s’agit d’apporter un regard différent sur les luttes féministes: celui de leurs ennemis.

Extrait de la note d'intention

Dans un contexte occidental toujours ancré dans le mouvement #Metoo, qui a donné à la parole des femmes un espace d’expression et d’écoute inédit, on pourrait croire que les choses avancent, que la condition des femmes évolue, qu’elles sont plus écoutées. Et c’est vrai, en partie, dans certains contextes. Mais il y a aussi l’émergence de nouveaux mouvements, de nouveaux discours haineux. Le masculinisme (idée que la société est en crise parce que les femmes ont trop de pouvoir) et la misogynie trouvent un élan de revitalisation sur internet, et notamment à travers la communauté des incels.

L’impact des incels ne se limite d’ailleurs pas au virtuel puisqu’ils ont déjà plusieurs tueries à leur actif. Aux États-Unis, la presse parle de mass shootings, de tueurs malades et isolés. Mais certaines féministes, et moi avec elles, parlent d’attentats et de terrorisme masculiniste. Ils sont décrits comme des malades mentaux, mais ils font plutôt penser à des êtres exceptionnellement sensibles à la folie et la haine qui les entoure.

Pour construire cette réflexion, j’ai choisi de me concentrer sur un seul de ces incels, dans l’idée que la comparaison entre deux individus (lui et moi) pourrait créer plus d’intimité et donc une réflexion plus enrichissante. Il s’agit d’Elliot Rodger, l’auteur du premier attentat perpétré au nom de la haine des femmes en 2014 à Isla Vista (Californie). Comme l’écrasante majorité des incels, Elliot Rodger était jeune, blanc, hétérosexuel, il passait l’essentiel de son temps sur internet ou à jouer aux jeux vidéo et il avait très peu d’amis. En un certain sens, je me sens proche de lui, moi aussi j’ai passé l’essentiel de mon adolescence sur internet ou à jouer aux jeux vidéo, et je n’avais pas beaucoup d’amis non plus.

Elliot Rodger a laissé sur son blog une autobiographie de 80 pages. Il y décrit son enfance et son adolescence passées dans sa chambre, ses sentiments, sa rage et sa frustration. Il y décrit enfin, et c’est là le point qui m’intéresse, ce qu’il ressent quand il voit des femmes dans la rue et qu’il tente de les aborder pour faire leur connaissance. Il considère l’espace public comme un terrain de chasse, et les femmes comme des proies qui lui doivent une soumission complète. Quand je marche dans la rue, je me sens rarement en sécurité. J’ai, comme la plupart des femmes, des tonnes d’anecdotes d’hommes qui m’ont abordée, insultée, agrippée, agressée. Je me suis toujours demandée pourquoi ces hommes m’abordaient dans la rue, ce qu’ils attendaient, s’ils pensaient vraiment que ça marche, des fois. Le récit d’Elliot m’offre une piste de réponse.

Ce projet est en cours de réalisation. Il a remporté l’appel à projet Geyser lancé par les Subsistances à Lyon et le Grütli à Genève, ce qui nous permet d’être suivi et conseillé par Yan Duyvendak. Les premières résidence de création auront lieu en novembre aux Subsistances. Une étape de prototypage sera présenté au Granit en novembre, puis au festival Temps d’image à Lisbonne, au National Theater Wales et à Colectiva en Roumanie. Ce prototype a été élaboré au sein du projet européen Open Access, projet de recherche autour des narrations transmédia.

Soutiens: Les Subsistances (Lyon), le théâtre du Grutli (Genève), programme européen Open Access: Le Granit (Belfort), Colectiva (Cluj, Roumanie), National Theater Wales (Cardiff, Royaume-Uni), festival Temps d’image (Lisbonne, Portugal)

Calendrier de tournée:

Du 14 au 16/01/2021 au Grütli (Genève)

Du 22 au 24/09/2021 à la Gessnerallee (Zurich)

Du 20 au 23/01/2022 aux Subs (Lyon)

Du 5 au 7/05/2022 à Auawirleben (Bern)

Du 4 au 11/06/2022 au Studio Théâtre (Nantes)

Du 8 au 25/08/2022 au Fringe Festival (Edimbourg)